A l’initiative de l’APTBEF et Tunisia Jobs : les résultats d’une enquête menée auprès des entreprises suite à la crise
L’Association Professionnelle Tunisienne des Banques et des Etablissements Financiers et Tunisia JOBS, programme américain de soutien à la création d’emplois dans le secteur privé, ont présenté aujourd’hui les résultats d’une enquête qu’elles ont menée conjointement, avec l’appui de la Banque Centrale de Tunisie, dont l’objectif était d’évaluer les besoins immédiats des entreprises, essentiellement les PME et les TPE, en cette période de crise et d’en mesurer l’impact sur le secteur bancaire et financier tunisien.
Le projet de collaboration de l’APTBEF avec Tunisia JOBS a démarré en avril 2020 dans le cadre d’une démarche d’accompagnement de la profession dans la mise en œuvre des mesures exceptionnelles décrétées par la BCT pour soutenir les PME dont l’activité a été affectée par le COVID-19.
Description de l’enquête pour la gestion immédiate de la crise :
L’enquête a été lancée en mai 2020 et a porté sur un échantillon de près de 2500 entreprises clientes des banques et des établissements financiers.
L’étude a été élaborée à travers un questionnaire qui couvre différents aspects de l’activité des entreprises et vise essentiellement à collecter les informations suivantes :
- Données socio-économiques de la PME
- Données financières et accès à la finance
- Niveau d’endettement des entreprises
- Environnement business et chaîne d’approvisionnement
- Environnement social et sanitaire
- Plan de gestion de la crise et plan de continuité de l’activité
- Niveau d’optimisme de la PME et de confiance dans le futur
- Données relatives au business et au management
La collecte de ces informations a permis de faire ressortir une analyse multi-dimensionnelle de la situation des entreprises qui sont touchées par la crise du Covid-19.
En effet, l’étude menée a dégagé des indicateurs pouvant être considérés comme révélateurs des moyens en possession de ces entreprises pour lutter contre les effets de la crise et leur capacité à y survivre.
L’analyse des réponses reçues a pu démontrer quels sont les secteurs d’activité qui ont été majoritairement affectés, les régions où l’impact a été ressenti le plus. Elle a aussi permis de dégager relativement le niveau d’impact sur les entreprises dont l’activité est totalement ou partiellement exportatrice ainsi que le niveau d’impact en fonction du degré de dépendance aux produits importés.
Les réponses relatives aux prévisions de la baisse du chiffre d’affaires et l’analyse de la situation financière générale ont permis d’évaluer les besoins urgents de ces entreprises en matière de financement.
Les indicateurs relatifs à l’endettement et à la capacité managériale ont, quant eux, déterminé leur niveau de préparation pour l’après-crise.
Un rating des secteurs d’activité et des régions a été élaboré en tenant compte de l’impact de la crise ; il reste à l’étude la possibilité de développer un rating par taille d’entreprise sur la base des données relatives à cet aspect tel que le chiffre d’affaires et le nombre d’employés.
PRINCIPAUX RESULTATS DE L’ENQUETE :
Genèse de l’échantillonnage
L’enquête a été menée entre mi-mai et fin juin 2020 auprès de 2451 entreprises réparties par taille (selon leur chiffre d’affaires annuel) en 5 catégories à savoir : moins de 250 mille dinars (26%), entre 250 mille et 1 million de dinars (32%), entre 1 et 2,5 millions de dinars (18%), entre 2,5 et 5 millions de dinars (10%) et supérieur à 5 millions de dinars (14%). La marge d’erreur tolérée a été de 15%.
Les secteurs d’activité des entreprises interrogées sont principalement : le commerce et la distribution avec 30%, le BTP et l’immobilier 9%, l’agriculture 3%, l’industrie manufacturière 12%, l’informatique, télécommunication et multimédia 6%, le tourisme, voyage et loisirs 6%, autres industries 7%, autres services 15%, etc.
Par zone géographique, les régions les plus représentées dans l’enquête sont le Grand Tunis, Sfax, Nabeul, Sousse, Monastir et Kairouan qui se taillent la part la plus importante, soit 81% environ de l’ensemble des entreprises impliquées dans l’enquête.
Il en ressort de la répartition des entreprises participantes à l’enquête en nombre d’employés que 59% d’entre-elles ont moins de 10 salariés et ne représentent que 12% des emplois. En revanche, 10% des entreprises interrogées ont plus de 50 salariés, ce qui représente environ 55% des emplois.
Répercussions financières
Bien que l’impact du Covid-19 sur le chiffre d’affaires varie d’une entreprise à l’autre, la baisse n’a épargné aucun secteur d’activité. Néanmoins, l’activité la plus touchée avec une baisse du chiffre d’affaires supérieure à 80% a été le tourisme-voyage-loisirs, suivi par la communication et les médias à près de 60%, le BTP et l’immobilier avec 54% des entreprises. Le commerce et la distribution ont enregistré un recul de 46%, l’industrie manufacturière de 40% et l’agroalimentaire 41% selon les résultats
Par contre, les secteurs dont les d’entreprises ont enregistré un chiffre d’affaires en recul de moins de 10% sont l’agriculture avec 21% des sondés, le secteur études et conseil avec 16% et l’ICT (informatique et télécommunication) avec 9%.
Capacité de reprise des entreprises
Les nouvelles commandes attendues par les entreprises révèlent en fait leur capacité de reprise. Sur la base des données fournies par celles impliquées dans l’enquête, seul un petit nombre d’entre-elles a pu revenir à 100% des commandes. La majorité demeure en dessous de 50% des commandes.
L’étude a également démontré que la capacité de reprise des secteurs comme l’ICT et l’agroalimentaire est plus importante que d’autres secteurs tels que le BTP et l’agriculture.
Capacité d’autofinancement
Trouver les ressources financières nécessaires pour subvenir aux besoins de son entreprise est le challenge auquel ont été confrontées toutes les entreprises suite à la chute de leur activité. L’enquête a démontré que la capacité d’autofinancement des entreprises en mois d’activité n’a pas dépassé 1 ou 2 mois dans 46% des cas pour atteindre 55% dans le secteur de l’agroalimentaire. Le secteur du commerce et de la distribution affiche par ailleurs 17% de capacité d’autofinancement entre 2 et 3 mois.
Besoins de financement sur 3 mois
Les besoins de financement des entreprises sur 3 mois, selon l’enquête, s’élèvent à plus de 554 MDT. Les secteurs d’activité ayant le plus de ressources financières sont le commerce et la distribution (plus de 145 MDT) et l’industrie manufacturière (plus de 112,5 MDT).
Perception de l’efficacité des mesures gouvernementales
Pour les mesures sociales prises par le gouvernement en faveur des entreprises, la moitié des entreprises interrogées ont été concernées par le plan de prise en charge des salaires, tandis que 79% des entreprises trouvent le report de 3 mois des contributions à la CNSS efficace. Par contre, de nombreuses entreprises travaillant dans les secteurs de la communication, des services financiers et du tourisme estiment « non efficace » la mesure de report des contributions à la CNSS de 3 mois.
Perception de l’efficacité des lignes de crédit dédiées aux PME
Plus de 85% des entreprises jugent efficace la ligne de crédit de soutien de 300 millions de dinars mise en place par le gouvernement. Sur les 15% restantes qui trouvent cette ligne de crédit non efficace, la plus grande proportion se situe dans les secteurs de l’agriculture, de la communication, de l’ICT et du tourisme.
Perception de l’efficacité du fonds de 500 MDT pour les PME
Plus de 90% des entreprises considèrent efficace le fonds de 500 MDT pour la restructuration des entreprises. Par contre, les plus grandes proportions d’entreprises qui trouvent ce fonds non efficace se situent dans les secteurs de l’agroalimentaire, de l’industrie manufacturière et du BTP.
Perception de report de 6 mois des crédits bancaires et des institutions financières
Plus de 87% des entreprises trouvent efficace la décision de report de 6 mois des crédits bancaires. Par ailleurs, la proportion d’entreprises qui trouve cette mesure non efficace se situe plus dans le secteur du tourisme.
Dépendance de l’import et de l’export
On constate selon l’enquête que plus de 11% des entreprises sondées sont dépendantes de l’export contre plus que la moitié des entreprises dépendant fortement de l’import, ce qui est bloquant, voire même très bloquant parfois devant la reprise.
Reprise et prévisions de retour à la normale
Sur l’ensemble des entreprises interrogées, 52% ont repris leur activité en juin mais seulement moins de la moitié prévoit un retour à la normale de leur cycle d’exploitation avant fin août.
Le pourcentage des entreprises qui reprendront leur activité avant fin juillet atteindra 73%, dont 42% prévoient de retrouver leur cycle complet d’exploitation avant fin septembre. Seulement 11% des entreprises reprendront leur activité à partir du mois d’octobre mais le retour à la normale est attendu à partir du mois de janvier 2021.
Quelle que soit la date de reprise, 65% des entreprises auront besoin au moins de 3 mois d’activité avant le retour à la normale de leur cycle d’exploitation qui sera également conditionné par la capacité d’autofinancement et la liquidité dont dispose l’entreprise, les nouvelles commandes et le besoin en financement.
Capacité managériale, optimisme et compétitivité
La majorité des entreprises jugent qu’elles ont une capacité managériale et une image de marque acceptables ou exceptionnelles. Par ailleurs, environ 75% des entreprises se montrent optimistes par rapport à l’avenir. De même, environ 75% se considèrent parmi les plus compétitives ou sans concurrents.
Risque d’approvisionnement et diversification des produits et des clients
Environ 75% des entreprises considèrent que le risque de leur chaîne d’approvisionnement est faible ou modéré, tandis que 10% le jugent élevé mais, pour certaines, pouvant être contourné.
L’enquête révèle aussi que les deux tiers des entreprises ont plus de 3 produits, ce qui est de nature à les rendre moins vulnérables en cas de crise. Celles qui ont 2 produits ou moins sont plus vulnérables. En outre, plus de 50% des entreprises ont une concentration sur leurs clients inférieure à 45%, contre environ 40% ayant une concentration supérieure à 45%.
L’étude démontre par ailleurs que presque 50% des entreprises n’ont pas de Plan de continuité de l’activité (PCA) ou bien est-il peu efficace, voire même non déployé.
Score du risque crédit
L’enquête démontre aussi que le score du risque-crédit par secteur d’activité est variable selon les régions. Par exemple, les secteurs de l’agriculture et de l’agroalimentaire ont un meilleur score dans les agglomérations de Tunis, Sfax et Sousse par rapport à leur score au niveau national. Le BTP a, en revanche, un score inférieur dans les trois agglomérations par rapport au score national.
On constate en outre que l’agriculture et l’agroalimentaire ont gagné des points au niveau du score du risque-crédit pendant la crise du Covid-19 par rapport à d’autres secteurs d’activité. En contrepartie, le tourisme a perdu beaucoup de points pour se retrouver désormais en dernière position.
Impact sur les emplois
Le modèle prédictif de l’impact de la crise sur les emplois par région dans l’immédiat et le court-terme donne des résultats contrastés. Les régions les plus impactées sont principalement Zaghouan, Mahdia, Kébili, Le Kef et Monastir. Par contre Tozeur, Siliana, Kassserine, Béja et le Grand Tunis sont les régions où l’impact sur les emplois est le plus faible.
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